28 février 2014.
C’est le jour où Michel Thierry Atangana, ingénieur français expatrié au Cameroun, fait son retour en France après avoir subi 17 années de détention arbitraire.
À l’origine, Michel Thierry Atangana rejoint le Cameroun pour présider le Comité de Pilotage et de Suivi des axes routiers, structure d’économie mixte mêlant membres du gouvernement camerounais et sociétés privées (dont certaines sont françaises). Il participe ainsi au développement du réseau routier camerounais.
Des tourments judiciaires inattendus vont pourtant porter un coup d’arrêt brutal à son activité.
La descente aux enfers commence le 12 mai 1997. Au motif de sa proximité supposée avec un adversaire politique du président Paul Biya, Michel Thierry Atangana est interpellé pour des faits de détournement et tentative de détournement de fonds publics et complicité de trafic d’influence.
Sans que la juridiction ne dispose de la moindre preuve, il est condamné à purger une peine de 15 années de prison.
En 2012, 15 ans plus tard, il est condamné à nouveau pour les mêmes faits que ceux qui ont fait l’objet de sa première condamnation. Cette fois, il écope d’une peine de 20 ans d’emprisonnement.
Enfermé dans une cellule semi-enterrée de 7m2, sans lumière, il subit des violences. Il parle de solitude spirituelle, mentale, morale et d’indifférence.
De nombreuses institutions et autorités s’en émeuvent : dès 2006, sa qualité de prisonnier politique est reconnue par le Département d’Etat américain et en 2013, le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies appelle à la libération immédiate de Michel Thierry Atangana constatant le caractère arbitraire de sa détention.
L’indifférence, c’est surtout celle des autorités françaises qui, pendant 13 ans, ne lui apporteront pas même la protection consulaire. Michel Thierry Atangana devra attendre 2014 pour que François Hollande s’intéresse à son cas et obtienne de son homologue Biya la signature de son décret de libération, le 24 février.
Le continuum de l’indifférence française perdure pourtant encore.
Même après sa remise en liberté et son retour en France, avec un billet d’avion qu’il a du acheter lui-même, Michel Thierry Atangana n’a bénéficié d’aucun suivi ni accompagnement.
10 ans après sa libération, il attend toujours le dénouement de la procédure pénale en cours devant les juridictions françaises et une indemnisation visant à réparer les préjudices multiples résultant de sa détention arbitraire.
Le Défenseur des droits, intervenu à l’instance devant la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions, a noté la durée particulièrement excessive de la procédure et a appelé à la reconnaissance du droit à indemnisation de Michel Thierry Atangana. Une expertise médicale est attendue.
Dans l’ouvrage “Survivre à l’injustice”, à paraître le mois prochain aux éditions du Cherche Midi, Michel Thierry Atangana relate ce véritable parcours du combattant qui commence en 1997 et qui continue encore aujourd’hui.
Son combat est aussi désormais celui de son association “Atangana contre l’oppression et l’arbitraire” (AACOA) destinée à l’accompagnement des victimes d’infractions et de détention arbitraire à l’étranger.