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Motivation des peines devant la Cour d’assises – Décision du Conseil constitutionnel

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Lire la dépêche AFP

 

Le Conseil constitutionnel a imposé vendredi aux cours d’assises de motiver les peines prononcées dans les procès criminels et non plus uniquement les raisons qui les ont conduites à déclarer un accusé coupable.

 

Cette décision devra être appliquée par les jurys de tous les procès d’assises qui s’ouvriront à partir de ce vendredi, précisent les « Sages », qui ont néanmoins laissé aux législateurs jusqu’au 1er mars 2019 pour abroger et réécrire la loi.

 

Le Conseil constitutionnel avait été saisi par la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), les requérants reprochant aux textes en vigueur « de porter atteinte aux principes de nécessité des peines, au droit à une procédure juste et équitable, aux droits de la défense et au principe d’égalité devant la loi et la justice ».

 

A l’audience le 13 février, le représentant du Premier ministre, Philippe Blanc, avait estimé que « les garanties » apportées par la procédure actuelle suffisaient à les prémunir contre « les risques d’arbitraire ».

 

« La situation n’est pas satisfaisante », avait dénoncé l’avocat Eric Dupond-Moretti qui plaidait pour la première fois au Conseil constitutionnel.

 

Aujourd’hui, « un homme condamné (aux assises) sait pourquoi il est condamné. Mais quand il prend une lourde peine, il ne sait pas pour quelle raison: est-ce dû à la sévérité du président, à l’air du temps, à la gravité des faits, à sa personnalité ? Mystère », a-t-il lancé, expliquant qu’il lui sera difficile de contester demain le quantum d’une peine sans savoir « comment les juges se sont convaincus ».

 

Depuis 2011, le président d’une Cour d’assises, ou l’un de ses assesseurs, doit, en cas de condamnation d’un accusé, motiver les principaux éléments à charge qui ont convaincu la cour de sa culpabilité. En revanche, une jurisprudence de la Cour de cassation interdisait la motivation de la peine.

 

Paradoxalement, les tribunaux correctionnels, appelés à prononcer des peines bien inférieures (dix ans maximum contre la perpétuité aux assises), étaient, eux, déjà obligés de motiver la peine prononcée car la loi insiste sur le fait « qu’une peine d’emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu’en dernier recours (…) si toute autre sanction est manifestement inadéquate ».

 

Dans sa décision qui représente un revirement de jurisprudence, le Conseil constitutionnel juge qu’il appartient aux législateurs « de fixer des règles de procédure pénale de nature à exclure l’arbitraire (…) dans « le jugement des personnes poursuivies ainsi que dans le prononcé et l’exécution des peines ».